Saviez-vous que ces petits poèmes japonais obéissaient à trois règles très simples, mais essentielles :
Tout d’abord, un haiku doit obligatoirement contenir un « mot de saison ».
On sait à quel point la nature et sa contemplation sont une composante essentielle de la culture nippone et tout haïjin qui se respecte (le poète de haïkus) doit évoquer dans son poème un élément qui rappelle une saison. Ce peut être un mot, une sensation, un parfum, un nom de plante, une fête rituelle…. le registre est immense mais peut-être pas autant qu’en japonais où l’on dénombre plus de mille « mots de saisons » répertoriés dans de gros dictionnaires !
La deuxième règle concerne la sonorité du texte puisqu’un haïku compte 17 syllabes (très exactement 5 + 7 + 5). Ainsi le haïku d’hiver du poète Kobayashi Issa :
Les flocons de neige
comme ils paraissent légers
dans le clair de lune
Ce découpage donne la musicalité toute particulière que l’on entend dans ces courts poèmes.
La troisième règle enfin concerne le rythme puisqu’il est souvent conseillé d’introduire une coupure dans le haïku. Encore une fois le poète Kobayashi Issa nous éclaire:
Petit escargot,
va doucement pour monter !
sommet du Fuji !
Vous pouvez voir qu’il y a un petit temps de silence entre la deuxième et la troisième partie, comme une courte respiration qui introduit la petite étincelle finale.
« Dans un haïku, il faut s’arrêter un moment pour laisser passer l’étonnement, la merveille, les souvenirs. Laisser les sons résonner, les parfums des arbres venir jusqu’à nous pendant la lecture. Laisser les nuages glisser dans le ciel, les rires partir en fusée, les feux d’artifice retomber en pluie de lumière ».
Je ne saurai vous dire à quel point j’adore lire ce genre de truc ! On a l’impression qu’en fait la vie est belle, non ?
Vous voilà fin prêts pour composer vos propres haïkus… enfin pas tout à fait. En parcourant ce bel ouvrage vous allez découvrir au fil des saisons toute la saveur de la philosophie et du savoir-vivre à la japonaise, vous allez explorer toutes les fêtes rituelles qui ponctuent l’année et glaner une foule de conseils pour apprendre à observer et à goûter toutes les jolies choses qui vous entourent, auxquelles peut-être vous ne prêtiez que peu d’attention.
J’ai moi-même encore beaucoup de boulot puisque comme vous le constatez je fais un peu de l’anti-haïku à longueur d’articles en écrivant des phrases super longues pour dire toujours un peu la même chose (si, si ne me dites pas le contraire)
Que n’ai-je écouté le conseil éclairé de Matsunaga Teitoku qui disait: « Evitez de vous répéter ! » (Oui, c’est bon j’fais ce que je veux quand même).
Fourni et très bien documenté, cet ouvrage vraiment agréable à lire propose de courts portraits de grands poètes, des tonnes de conseils, des jeux et des petits ateliers d’écriture pour s’exercer à la composition de haïkus.
Ajoutez à cela les illustrations ravissantes, tout en finesse et tellement élégantes de Sandrine Thommen dont j’avais déjà beaucoup apprécié le travail dans cet album-là et vous obtiendrez ce livre raffiné, plein d’enseignements et certainement très utile dans le cadre d’un atelier d’écriture.
Je vais arrêter là car les haïkus c’est un peu mon dada, ma petite faiblesse à moi (je sais, on ne jurerait pas. Pourtant dans une autre vie j’ai été très minimaliste)
Et hormis ce livre-là chez Picquier Jeunesse que je vous recommande vivement et que je me suis empressée de m’acheter, je vous conseille également en littérature adulte (la vraie, quoi) la petite merveille intitulée « Haïkus des quatre saisons », illustrée par des estampes d’Hokusaï aux éditions du Seuil… magnifique !
« J’écris des haïkus ». Texte de Véronique Brindeau. Illustrations de Sandrine Thommen. Editions Picquier Jeunesse. 17,00 €