Posté par Véro le 31 - 08 - 2015

J\'ai peur de savoir lire

Quand il fait sa rentrée au CE2  le petit Stéphane, il comprend que ça ne va pas être de la tarte.

Heureusement que tous les copains de l’année dernière sont là, ça donne du courage, et il en faudra pour affronter tous les soirs une liste de devoirs longue comme le bras.

Stéphane n’est pas à proprement parler un pro des devoirs vite faits bien faits, il n’est pas non plus du genre à les zapper complètement, disons qu’il navigue entre les deux et que sa maman n’est pas toujours dispo pour l’aider. « A cause de son travail, à cause du fait qu’il n’y a qu’elle et moi à la maison et que la maison aussi a ses devoirs et ses conjugaisons de tous les jours: laver, repasser, nettoyer, cuisiner »

Mais voilà que maman justement a décidé de s’impliquer un peu plus dans la vie scolaire de son rejeton, parce qu’elle a envie de le voir progresser, se surpasser. C’est ce qu’elle lui dit quand elle lui propose de commencer avec lui à lire un peu tous les soirs pour s’entrainer, pour apprendre du vocabulaire, pour rester concentré. « Ça me va de lire mais pas trop longtemps, parce que ça se brouille dans ma tête après et c’est comme si je perdais l’équilibre. Pareil qu’un funambule. Je perds le fil, je tombe et puis je n’arrive plus à mettre un pied devant l’autre ».

Avec cette lecture en duo, ce petit moment partagé chaque soir, Stéphane commence à prendre goût à la lecture et aux livres. Il en prend même parfois les jours de pluie à l’école, pour bouquiner un petit peu sous le préau.

Et puis ce qui devait arriver arriva : maman lui apprend qu’il est prêt pour lire tout seul le soir, comme un grand. Qu’il n’a plus besoin d’elle, qu’il peut voler de ses propres ailes parce que de toute façon « grandir c’est apprendre à devenir seul »

Voilà le pauvre petit Stéphane privé de ses tête-à-tête privilégiés avec sa maman… Autant dire que cette pseudo liberté prend plutôt pour lui le goût d’une punition et ses angoisses de ne pas y arriver reviennent au galop.

C’est sans compter sur la magie de la lecture qui ne tarde pas à opérer, le pouvoir des mots que ce petit lecteur en herbe va expérimenter : « Le livre a commencé à me captiver. Je suis prisonnier mais la prison ne ressemble pas du tout à ce que j’imaginais. Les fenêtres sont ouvertes, on sent l’odeur du sel quelque part vers l’océan, on court dans un paysage de dunes sans être jamais essoufflé, et il fait grand jour ».

C’est ça la petite musique singulière d’Olivier de Solminihac, dont je vous avais déjà parlé en vous présentant « Dormir avec une fille » dans la même collection, un joli style, de la finesse et des questionnements importants présentés avec poésie.

Une pointe d’humour dans les illustrations qui accompagnent ce cheminement jusqu’au plaisir de lecture par le biais de courts chapitres joliment annoncés par de simples verbes, « changer », « devoir », « compter », « persévérer »…

Ceux qui n’aiment vraiment pas lire tout seuls pourront tout à fait partager ce petit roman sensible avec leurs parents qui apprécieront comme eux la qualité de l’écriture et la grâce pudique de ce joli texte.

lire« J’ai peur de savoir lire ». Olivier de Solminihac. Illustrations de Juliette Baily. Ecole des Loisirs. Collection Mouche. 8,00€

 

 

 

Catégories: Petite Enfance

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